Les Femmes et les Hommes au centre de l’Échiquier

Les Femmes et les Hommes au centre de l’Échiquier

20% des licencié·e·s de la Fédération Française des Échecs en 2018 étaient des femmes (dont les deux tiers ont moins de douze ans). En janvier 2021, ce chiffre est tombé à 17%.

Depuis trop longtemps, la place des femmes dans notre discipline a systématiquement été pensée comme une activité annexe à celles de la FFE. Penser, écrire, et assumer qu’il y a le jeu d’échecs d’une part, et le jeu d’échecs « au féminin » d’autre part, c’est d’ores et déjà renoncer à l’égalité entre les femmes et les hommes dans la pratique du jeu d’échecs.

L’enjeu de la mixité est celui de chacun·e et celui de tous les instants. La FFE ne peut plus se débarrasser de la question de la place des femmes aux échecs en la confiant à quelques personnes de bonne volonté sans moyens humains ni financiers.

L’investissement des femmes dans l’ensemble des domaines de la fédération grandira sous l’impulsion des femmes et des hommes, ensemble. C’est pourquoi il n’y a pas d’autre alternative que de travailler et de réfléchir ensemble dès aujourd’hui pour être meilleur·e·s demain.

La vision de la liste Ouverture sur la place des femmes dans notre fédération est institutionnelle. Par un plan de féminisation qui se concrétisera par un plan de mixité, la liste Ouverture offrira aux femmes et aux hommes la même place au centre de l’échiquier.

Et disons-le d’ores et déjà : proposer un plan de mixité, ce n’est pas vouloir la fin des tournois féminins. C’est penser l’égalité femmes-hommes dans sa globalité et dans son équilibre, sans se limiter aux actions exclusivement tournées vers le public féminin, tout en les utilisant à bon escient.

Dans ce document, de nombreuses références sont faites aux autres pans de notre programme : scolaire, formation, gouvernance, haut-niveau. Ce travail nous a demandé du temps, et il nous paraissait déraisonnable de réfléchir à la place des femmes dans notre discipline sans avoir travaillé préalablement sur la cohérence générale de nos actions.

Nous nous devions d’être la liste qui pense la mixité au cœur de tous les aspects de la FFE, et non comme un thème de complément. Cette méthode nous semble être la seule qui nous permette d’espérer les progrès.

AXE 1 : SENSIBILISER LES ACTRICES ET LES ACTEURS FÉDÉRAUX AUX NOTIONS DE MIXITÉ ET DE LUTTE CONTRE LES STÉRÉOTYPES DE GENRE

« Le jeu d’échecs plaît aux garçons car ils ont un tempérament de combattant que les filles n’ont pas, à quelques exceptions près ». Présenté trop souvent comme un argument d’autorité, ce stéréotype est hérité de notre société. Dès le plus jeune âge, les filles et les garçons sont la plupart du temps orienté·e·s vers un comportement différencié, que ce soit par identification au modèle familial, par influence des médias, par tradition, etc, etc… La pratique du jeu d’échecs, jeu inclusif par excellence, peut et doit être un levier de lutte contre cet état de fait.

Les filles et les femmes qui pratiquent longtemps le jeu d’échecs sont en effet celles qui se sentent le plus capables d’exprimer leurs qualités de combat dans cette discipline qui en demandent beaucoup. Néanmoins, il s’agit désormais de travailler pour lutter contre le découragement de celles qui ont, à cause de comportements ou de mots involontaires ou volontaires, perçu que leur genre était un obstacle à leur progression.

ACTION 1 : FORMER ET SENSIBILISER LES DIPLÔMÉ·E·S DE LA FFE AUX NOTIONS DE MIXITÉ ET DE LUTTE CONTRE LES STÉRÉOTYPES DE GENRE

Les premier·e·s concerné·e·s dans le face à face pédagogique bénéficieront dans leur formation d’un module de sensibilisation à la mixité et aux stéréotypes de genre :

  • Sensibilisation au phénomène de conditionnement volontaire ou involontaire
  • Travail de situations types : accueil / initiation / entraînement
  • Connaissances historiques et sociologiques sur l’évolution du positionnement des femmes vis-à-vis des hommes et des hommes vis-à-vis des femmes dans la société
  • Partages de témoignages (parcours / expériences)

ACTION 2 : SENSIBILISER LORS DES ÉVÈNEMENTS JEUNES PUBLICS

  • Organisation d’une conférence et d’un moment d’échange à destination des accompagnant·e·s, des dirigeant·e·s et des technicien·ne·s pendant le championnat de France des Jeunes, en partenariat avec l’association Egal’Sports
  • Exposition de matériel de sensibilisation (Roll up / Flyers) à la question de l’égalité hommes-femmes dans le sport pendant les championnats régionaux.

La communication doit permettre à chacune et chacun de s’identifier en évitant les idées reçues.

ACTION 3 : CRÉER UN RÉSEAU DE RÉFÉRENT·E·S MIXITÉ POUR CHAQUE LIGUE RÉGIONALE

  • La déclinaison du projet mixité est essentielle sur l’ensemble du territoire national. C’est pourquoi nous créerons un réseau de personnes motivées, passionnées et formées sur la thématique de la mixité. Ces personnes seront en contact entre elles et/ou avec la Direction Technique Fédérale et/ou avec l’Institut National de Formation tout au long de l’année et se rencontrent à minima 1 fois par an lors du colloque annuel des référent·e·s mixité. Leur mission est de mettre en place les actions du projet mixité qui leur paraissent les plus pertinentes en fonction des besoins de leur ligue (démographie, statistiques hommes/femmes…).
  • Réflexion et décision lors du Conseil des Ligues sur le sujet du budget mis à disposition par chaque ligue pour les actions du projet mixité.

AXE 2 : FIDÉLISER LES LICENCIÉES – AIDER LES CLUBS À CONSTRUIRE LEUR PROJET DE DÉVELOPPEMENT AUPRÈS DES PUBLICS FÉMININS

  • Renforcement du projet Smart Girls grâce à la plateforme numérique scolaire Ouverture (équipes de jeunes filles créées et récompensées).
  • Promotion du pôle de Service aux clubs et de la plateforme Ouverture Service aux clubs pour mieux comprendre les subventions possibles pour le développement de la pratique sportive féminine, et en bénéficier.
  • Favoriser une pratique « loisir » féminine par le renforcement de dispositifs de tournois féminins.

AXE 3 : AMÉLIORER L’ENGAGEMENT DES FEMMES DANS TOUS LES SECTEURS DE LA FFE

ACTION 1 : CRÉATION DU CLUB DES 100 DIRIGEANTES

Une seule femme préside actuellement une ligue régionale et moins d’une dizaine président un comité départemental.

Nous créerons ce groupe de 100 femmes volontaires, déjà dirigeantes ou non, et ayant déposé leurs candidatures pour perfectionner leurs compétences et les accompagner tout au long de notre mandature, afin de leur donner l’envie et la confiance nécessaire pour accéder à un poste de responsabilité au sein de la FFE (échelon national, régional, départemental ou de club) :

  • Trois « promotions » : 2021-2022, 2022-2023, 2023-2024
  • Formation régulière par séances courtes en visio-conférence
  • Intégration immédiate dans une instance dirigeante de son choix (club / CD / Ligue / Commission fédérale) pour participation / observation / décision avec ou sans droit de vote suivant les statuts de l’instance
  • Modules de formation des dirigeant·e·s (gestion de club – gestion de projet – conduite de réunion – aisance à l’oral)
  • Modules de gestion financière et administrative
  • Modules de développement personnel (techniques de communication – mises en situation – confiance en soi – prise de parole en public)
  • Module de présentation du dispositif Ouverture « Faire grandir son club »
  • Partage d’expériences et de situations par le site Ouverture « Service aux clubs »

ACTION 2 : CRÉATION DU GROUPE DES 100 PROFESSEURES

Afin de contribuer à une meilleure visibilité des femmes dans notre fédération, il est essentiel que les femmes soient mieux représentées dans les effectifs d’enseignement.

La mixité des enseignant·e·s produit des bénéfices considérables pour le développement de l’enfant et améliore la volonté de perfectionner son jeu pour de nombreuses femmes.

Nous créerons ce groupe de 100 femmes volontaires et ayant déposé leurs candidatures pour les accompagner dans leurs parcours de formation pour enseigner les échecs auprès de différents publics :

  • Contenu de formation identique pour les femmes et les hommes (cela semble aller de soi mais…). Les contenus des formations fédérales doivent prendre en compte la singularisation de l’entraînement du public visé (mode d’apprentissage adapté en fonction de l’élève) et ne doit pas être pensé en fonction du genre du public visé.
  • Tarif préférentiel de l’inscription aux formations d’initiatrice – animatrice – entraîneure.
  • Accompagnement proactif de la FFE pour aider les stagiaires à intégrer une structure pour pratiquer au plus vite.
  • Sensibilisation à l’intérêt d’une formation d’arbitrage.

ACTION 3 : COMMUNIQUER AUTOUR DE NOS PERSONNALITÉS (MODÈLES) :

Que ce soit un·e membre de notre famille, un·e enseignant·e, une personnalité médiatique, chacun·e a eu un jour un, voire plusieurs modèles. Quelqu’un qui nous a inspirés, à travers qui nous nous sommes identifiés, quelqu’un qui nous a aidés à oser choisir une voie, à tenter quelque chose que nous ne nous pensions pas capables de réaliser. Il en est de même aux échecs.

Nous veillerons à ce que les femmes soient également représentées dans tous les axes de communication en mettant en évidence des personnalités au parcours sportif ou associatif remarquable (dirigeante – championne – arbitre – bénévole).

Il ne s’agit pas uniquement de parité, il s’agit également du rôle que tiennent les protagonistes (femme ou homme) dans les publications et de ne pas renforcer les stéréotypes de genre (exemple : « les hommes aiment la compétition vs les femmes aiment le loisir » – « les jeunes filles restituent bien mieux que les garçons les techniques apprises vs les garçons préfèrent la victoire au beau jeu»)

  • Promotion régulière de rôle modèle sur le site Ouverture « Plateforme des scolaires »
  • Création d’évènements à destination de jeunes publics avec présence simultanée d’une femme et d’un homme ayant le même statut (exemple : une joueuse de l’équipe de France avec un joueur de l’équipe de France).

AXE 4 : PROPOSER UNE PRATIQUE COMPÉTITIVE ÉQUITABLE DES PLUS JEUNES JUSQU’AU PLUS HAUT NIVEAU

ACTION 1 : LA MIXITÉ INCITÉE DANS TOUS LES CHAMPIONNATS DE LIGUE JEUNES

Au contraire de la pratique « loisir », la pratique de compétition exclusivement féminine est nuisible à la mixité de notre discipline et à la progression des joueuses de compétition. 3 ligues pratiquent aujourd’hui la mixité totale pour leurs tournois de qualification (d’autres la pratiquent partiellement, principalement en cas d’effectifs trop bas dans les catégories filles).

Nous proposerons à toutes les ligues régionales d’appliquer la mixité dans leurs compétitions de ligue (« petites catégories » ou « toutes catégories »). Les joueuses concernées pourront donc concourir simultanément pour la qualification en catégorie fille et en catégorie mixte au championnat de France des Jeunes. Sans la féminisation des championnats de ligues et les efforts de féminisation de tous les secteurs de la fédération, il ne semble pas qu’une solution technique satisfaisante apparaisse pour le moment pour que les championnats de France jeunes soient mixtes. Une nouvelle évaluation de la situation sera effectuée à mi-mandat.

Les instances des ligues régionales auront la possibilité d’accepter ou de refuser la mixité de leurs tournois de qualification régionaux pour les grandes catégories. Nous tenons à ce que la mixité soit appliquée dans les petites catégories (U08 et U10) avec une évolution progressive vers les autres catégories au fil des années. Ces réformes seront faites en concertation avec les organes déconcentrés, et nécessiteront leur approbation.

ACTION 2 : PROPOSER LE MÊME ENTRAÎNEMENT AUX JOUEUSES ET AUX JOUEURS DES ÉQUIPES DE FRANCE

  • Les stages de préparation des équipes de France adultes et jeunes seront identiques en nombre, en budget et en contenu
  • Les joueuses et les joueurs de l’équipe de France Jeunes bénéficieront de formations assurées par les mêmes entraineur·e·s, et bénéficieront de formations de joueurs et de joueuses de l’équipe de France adultes
  • Les entraineur·e·s de l’équipe de France Jeunes doivent être sensibilisés et formés sur la question de la mixité et les stéréotypes de genre (voir axe 1)

CONCLUSION

La FFE a reculé ces dernières années dans ses objectifs de féminisation et a pris le chemin inverse de la mixité dans ses effectifs. Nous placerons la question de la mixité et de l’égalité femme-homme au cœur de notre fonctionnement institutionnel.

Nous devons créer les conditions qui permettent à chacune et chacun de se réaliser en tant que joueuse / joueur, dirigeant·e·s, arbitre, formatrice / formateur. Les actions décrites dans ce programme symbolisent notre idée que c’est vers la masse que nos efforts de féminisation et de sensibilisation doivent se tourner prioritairement. L’éducation est l’arme la plus puissante pour changer le monde (N. Mandela).

Le jeu d’échecs est un jeu qui peut être pratiqué de manière intégralement mixte, cette pratique n’ayant ni obstacle intellectuel, ni obstacle physique majeur pour les différents publics.

La FFE est une des rares fédérations sportives agrées à bénéficier de cette chance. Elle doit en être à la hauteur et devenir un modèle aux yeux de ses membres et aux yeux des autres fédérations sportives.