Rémunérer un dirigeant : les détails juridiques

Rémunérer un dirigeant : les détails juridiques

Depuis quelques jours, nous faisons face à une campagne de désinformation où des opposants tentent de faire croire que la Fédération ne peut verser de rémunération à ses dirigeants en raison de la reconnaissance d’utilité publique dont elle bénéficie depuis 2015.

C’est évidemment faux.

Notre équipe a travaillé juridiquement le sujet en profondeur. La légalité de cette mesure est pleine, et ceux qui tentent de faire croire le contraire sont des étourdis, ou plus probablement des menteurs.

Les dispositions légales qui encadrent la rémunération

Les rémunérations de dirigeants d’organismes sans but lucratif (OSBL) sont encadrées par l’article 261 (alinéa 7.1.d) du Code Général des Impôts. Celles-ci sont ouvertes ci-dessous à toutes les associations 1901 ainsi qu’aux fondations reconnues d’utilité publique :

En ce qui concerne l’instance compétente pour décider de la rémunération, le texte de loi fait référence à « l’organe délibérant ». L’administration fiscale, dans le BOFIP du 7 juin 2017 est venue préciser cette notion en indiquant au point 180 :

une délibération et un vote de l’instance délibérative statutairement compétente qui fixent le niveau et les conditions de rémunération hors de la présence du dirigeant concerné. La décision de l’organe délibérant doit être prise à la majorité des deux tiers des membres de ce dernier, présents ou représentés. Lorsque l’organe délibérant n’est pas l’assemblée générale, cette condition suppose la participation effective de l’ensemble des membres de l’organe délibérant et non simplement des seuls membres présents lors de la délibération

On voit donc clairement que la loi n’impose pas que ce soit l’Assemblée Générale qui fixe la rémunération. Pour notre fédération, l’organe compétent statutairement est le comité directeur :

[Les membres du bureau fédéral] peuvent recevoir des rétributions telles qu’encadrées par les dispositions des articles 261.7.1°.d et 242 C du Code Général des Impôts, en dehors desquelles, aucune rétribution n’a lieu. Ces rétributions, nominatives et non es-qualité, sont fixées et approuvées par le Comité Directeur, hors la présence des intéressés, à la majorité des deux tiers des membres présents.

Article 7.6 des statuts FFE

Rappelons au passage que selon nos statuts, le Président est par défaut rémunéré :

En raison des fonctions qui lui sont confiées, le Président de la FFE est rémunéré dans le respect des dispositions statutaires et fiscales telles qu’encadrées par les dispositions des articles 261.7.1°.d et 242 C du Code Général des Impôts, sauf s’il décide expressément d’y renoncer.

Article 8.2 des statuts FFE

Une pratique courante dans d’autres fédérations

Par ailleurs, il faut savoir que toutes les fédérations sportives agréées sont reconnues d’utilité publique depuis 2015 (III de l’article L.131-8 du Code du Sport), c’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous le sommes.

Or, il existe de nombreuses autres fédérations sportives qui prévoient la possibilité de rémunérer leurs dirigeants en respectant le cadre légal que nous venons de présenter. Quelques exemples :

Dans ces trois cas, la rémunération est décidée par le comité directeur, à la majorité des 2/3, toujours dans le respect des dispositions des articles 261 et 242 C du CGI dont nous avons parlé.

C’est ainsi que la Fédération Française de Rugby, qui est reconnue d’utilité publique depuis 1922 (soit 93 ans avant nous !), a décidé lors de son Comité Directeur du 21 octobre dernier de rémunérer 3 de ses dirigeants.

Une solution recommandée

Enfin, rappelons que la rémunération des dirigeants de fédération est recommandée par le Comité National Olympique et Sportif Français qui, en 2012, dans son rapport « Mieux adapter la gouver­nance des fédérations aux enjeux de la société » listait notamment parmi les avantages à une telle mesure :

— une meilleure disponibilité du ou des dirigeants rémunéré

— susciter un intérêt/vocation auprès des personnes qui, au-delà de la connaissance de la discipline, ont développé professionnellement des qualités managériales, de gestion et de direction pouvant bénéficier à la fédération

— un rajeunissement probable des dirigeants éligibles à une rémunération, spécifiquement les présidents de fédérations.

Plus récemment, la mission d’information sénatoriale sur « le fonctionnement et l’organisation des fédérations sportives » dont le rapport a été rendu en septembre 2020 va dans le même sens.