L’association Échecs & Mixte a interpellé notre liste (ainsi que les listes concurrentes) sur notre projet et notre vision pour le « secteur féminin ». Vous pourrez trouver ici le courrier qui nous a été envoyé, et nous publions ci-dessous notre réponse qui vient en complément de notre fiche programme détaillée sur le sujet : Les Femmes et les Hommes au centre de l’Échiquier.
Bonjour,
Nous tenons à remercier l’association Échecs & Mixte pour son implication dans cette campagne. Nous venons de publier sur notre site internet notre fiche programme sur la mixité : Les Femmes et les Hommes au centre de l’Échiquier. Nous vous invitons à la lire car elle développe notre vision d’ensemble sur la place des femmes dans notre fédération et nous semble répondre à beaucoup d’interrogations que vous posez dans votre lettre.
En complément, nous apportons également ci-dessous quelques réponses supplémentaires aux questions de votre courrier.
Le plan de féminisation actuel de la FFE
Vous nous questionnez sur ce que nous comptons garder et appliquer dans le plan de féminisation qui a été élaboré par la FFE. Nous avons donc souhaité reprendre action par action les différentes propositions de celui-ci.
Fidéliser nos licenciées
Le label club féminin. Celui-ci nous semble pouvoir évoluer vers un label Mixité qui tiendra compte de la capacité des clubs à s’engager à communiquer auprès de ses adhérent⋅e⋅s sur le sujet des stéréotypes de genre, et à appliquer des mesures concrètes pour la participation des femmes dans leurs instances et dans leurs activités.
La semaine des échecs au Féminin. Nous y sommes favorables à condition que les actions soient dirigées vers la pratique « loisir ». Les jeunes joueuses de compétition concernées par la semaine des échecs au Féminin devront de préférence bénéficier d’activités dont la communication valorise la mixité. Le nom de cette semaine de promotion devra également être repensé.
La pratique familiale et les compétitions inter-familles. Ces actions feront partie de la boîte à idées et de la boîte à outils utilisées par le Pôle Service aux clubs.
Conquérir de nouvelles pratiquantes
Programme de parrainage. Cela est tout à fait dans l’esprit de la mise en lumière de rôles-modèles, et nous y sommes donc favorable.
Une politique tarifaire favorisante. Oui, pour les jeunes publics de Smart Girls.
Un guide des bonnes pratiques d’accueil des joueuses au sein des clubs. Nous sommes très sceptiques sur ce point, la qualité de l’accueil et leur état de propreté n’est pas qu’un enjeu féminin. Nous craignons donc que la limite entre ce guide et la diffusion involontaire de stéréotypes de genres soit très mince.
Création d’un module de formation pour sensibiliser les initiateurs et formateurs. Cela fait partie de notre programme (voir site internet) dans le cadre de notre Institut National de Formation.
Renforcer les partenariats avec les institutions du sport scolaire. Pas nécessairement avec les fédérations citées. Nous nous concentrerons sur le projet CURSUS (voir notre projet scolaire). L’élaboration préalable des indicateurs d’évaluation du bénéfice de l’enseignement du jeu d’échecs sur 3 années devra tenir compte prioritairement de la notion de mixité dans la pratique du jeu d’échecs.
Renforcer l’accès aux responsabilités des femmes
Nous nous inscrirons pleinement dans cette démarche. Nous attirons d’ailleurs votre attention sur le nombre de femmes qui composent notre liste (⅓ des sièges), qui (sans atteindre toutefois la parité) constitue la plus haute proportion à une élection fédérale depuis l’instauration du scrutin de liste.
Création d’un club des dirigeantes et animation du réseau. Hommes et femmes seront amené⋅e⋅s à partager leurs expériences sur la plateforme « Service aux clubs ». En parallèle, comme indiqué dans notre fiche projet, nous créerons un club de 100 femmes volontaires, déjà dirigeantes ou non afin de leur donner l’envie et la confiance nécessaire pour accéder à un poste de responsabilité au sein de notre fédération.
Partenariat avec les CROS et CDOS et les associations en faveur de la promotion du sport féminin. Oui, nous avons structuré notre programme de féminisation / mixité avec les conseils de l’association Egal’Sport.
Structurer et développer une offre de formation à destination des femmes
Favoriser la mixité dans les stages de formation. Nous sommes opposé⋅e⋅s à l’idée de différencier les attendus des diplômes fédéraux comme peuvent le proposer d’autres candidat⋅e⋅s. Une politique de mixité ne passe pas par la création d’un « diplôme au rabais ». En revanche, nous souhaitons inciter les femmes à se former afin de féminiser notre corps d’encadrant⋅e⋅s, par exemple en offrant pour chaque inscription d’une femme à un stage de formation une 2e inscription à une autre femme.
Tendre vers la parité sur l’arbitrage des grands championnats. Nous y sommes bien évidemment favorables, tout en rappelant que nous ne pourrons y parvenir qu’en arrivant à augmenter sensiblement le nombre de femmes arbitres en France qui ne représentent pour l’heure que 8,5% des effectifs.
Vos propositions
Concernant la règle dite « de la féminine obligatoire en Nationale »
Le Laboratoire interdisciplinaire d’évaluation des politiques publiques (LIEPP) de Science Po Paris mène depuis 2 ans des travaux de recherche sur « Les effets des quotas de genre », sous la direction notamment de Muriel Niederle et José de Sousa. Cette étude analyse les conséquences de l’introduction en 1990 dans notre discipline d’un quota de genre dans nos compétitions fédérales mais nous ne disposons pas encore de sa conclusion définitive.
Même si la politique de quota peut toujours être jugée avec une certaine méfiance, elle peut avoir son intérêt dans les fédérations trop déséquilibrées dans la représentation femmes/hommes. En ce sens, elle n’est pas éloignée par exemple de la parité instaurée pour les listes aux élections politiques, qui faisait suite aux propositions de Gisèle Halimi dès 1982 d’un quota de 25% de femmes sur chaque liste.
Elle nous semble être une bonne mesure pour les niveaux TOP 12 et N1, puisqu’elle favorise la progression des meilleures joueuses françaises qui peuvent participer contre et aux côtés de compétitrices/teurs d’élite.
La question est en revanche plus délicate pour la N2, où l’on constate plus d’anomalies, avec parfois des joueuses de niveau drastiquement plus faible que le reste de l’équipe.
La solution alternative proposée par votre association (quota de joueuses sur l’ensemble des parties jouées sur une saison en Nationale-Régionale-Départementale) nous semble envisageable à la condition qu’elle ne représente aucune complication pour les dirigeant⋅e⋅s déjà largement contraint⋅e⋅s de maîtriser beaucoup de règlements.
Par ailleurs, nous ne sommes pas sûr⋅e⋅s que cette mesure pourra lutter si efficacement contre les défauts cités lorsque l’on évoque la règle de la joueuse obligatoire. Qu’est-ce qui empêcherait un⋅e capitaine ou un⋅e dirigeant⋅e de respecter ce quota global en forçant des joueuses trop jeunes ou trop faibles à jouer des parties déséquilibrées (si par exemple, les effectifs féminins du club ont subitement chuté et/ou si le club n’a pas ou peu d’équipes engagées dans les petites divisions ?)
La sécurisation de l’entraînement des joueuses de haut niveau les plus fortes ou les plus prometteuses
À notre connaissance, la FFE ne propose d’entraînements à personne : ni à son élite mixte, ni à son élite féminine (à part quelques entraînements ponctuels avant les grandes compétitions internationales), ni à son équipe de France des Jeunes. Cette question est donc directement liée aux ressources financières de la FFE. Nous ne disposons pas aujourd’hui de suffisamment d’informations sur les finances actuelles pour s’engager sur ce terrain sans prendre le risque de faire de grossières promesses électorales.
Transformer une partie des prix du National féminin en une allocation qui permettrait de laisser le choix aux joueuses du tournoi qu’elles désirent vraiment jouer l’année suivante
Dans le but de communiquer largement sur les rôles modèles (voir programme), nous sommes attaché⋅e⋅s à la valorisation du National Féminin. Nous sommes aussi très attaché⋅e⋅s à l’idée que les meilleures joueuses puissent jouer l’Accession, mais nous serons tenus à cette double motivation :
- garder un National Féminin attractif
- avoir une vision claire de nos perspectives financières à notre arrivée si les clubs en décident ainsi.
L’aide aux tournois fermés ayant des participantes françaises
Nous partageons entièrement votre point de vue. Il faut savoir qu’actuellement, la fédération verse déjà une aide financière aux tournois à normes. Nous sommes favorables à la mise en place d’un système de bonification de cette aide afin d’encourager la participation de joueuses.
L’aide aux joueuses étudiantes pour continuer à s’entraîner
Nous ne sommes pas certain⋅e⋅s que ce point relève de la question de la mixité. Vous notez que « beaucoup de joueurs et encore plus de joueuses abandonnent les échecs au moment de débuter leurs études. » Nous partageons effectivement ce constat mais il nous semble, hélas, que ce phénomène n’est pas propre à la période du début des études supérieures. En effet, le plan de féminisation fait le constat d’une chute massive du nombre de licenciées au-dessus des catégories U12 avec une division des effectifs par 16 entre les Pupillettes et les Cadettes. Nous espérons y remédier avec le programme proposé.
La mixité des championnats jeunes
Nous partageons votre objectif et nous vous renvoyons à notre programme pour le détail de la mise en place. Nous pensons que celle-ci doit se faire non pas contre, mais avec les organes déconcentrés. Nous avons le devoir de les convaincre que la mixité des qualifications départementales et régionales représente une réelle opportunité pour nos joueuses.
Nous espérons que cette présentation vous aura donné une idée détaillée de nos intentions, et nous vous remercions de votre contribution au débat démocratique pendant la campagne.
Pour la liste Ouverture,
Éloi Relange
Grand Maître International
Candidat à la présidence de la FFE